lettre ouverte aux élus 2023

lettre ouverte aux élus 2023

Brest, le 26 juillet 2023

Monsieur le Maire-Président François Cuillandre,

Madame l’adjointe au Maire Marie-Pierre Creff,

Madame la vice-présidente Tifen Quiguer,

Une fois encore, nous sollicitons votre attention, et celle des élus brestois, sur notre quartier.

En tant que riverains des rues Fréminville, Lars et Legendre, nous avons été conviés, une troisième fois, à une réunion d’information concernant un projet immobilier.

Cette lettre, datée du 29 juin, a été déposée dans nos boites le 4 ou 5 juillet, pour une réunion prévue le 10. Heureusement, nous sommes réactifs et impliqués dans notre quartier, et n’étions pas tous en congés. Quelques-uns d’entre nous ont donc pu se rendre à la réunion, et nous avons même eu le plaisir de rencontrer de nouveaux voisins à cette occasion, et nous rendre compte que nous étions tous sur la même longueur d’ondes.

Le projet est cette fois porté par le promoteur Lamotte Constructeur 29, mais le maître d’œuvre reste le même, et le projet est similaire aux précédents, voire plus imposant encore :

  • 25 logements au lieu de 24
  • une implantation utilisant toute la surface de la parcelle (voire débordant sur la rue pour les containers de déchets)

Pourtant, onze ans ont passé. Nous avions relevé à l’époque des aspects problématiques d’un point de vue environnemental, sur la gestion de l’eau notamment. En 2023, dans le contexte d’un changement climatique reconnu par tous, documenté et de mieux en mieux pris en charge par les acteurs de la ville, nous ne comprenons pas ce projet.

Sur le plan architectural, les modifications sont minimes, il s’agit toujours d’un bâtiment dont le volume ne correspond pas aux volumes environnants, dont l’architecture n’a aucune vocation à dialoguer avec le bâti existant, et encore moins à mettre en valeur le patrimoine architectural, dont certains ensembles sont pourtant protégés en tant qu’immeubles remarquables.

A l‘échelle des riverains, les préjudices identifiés sont:

  • perte de vue
  • perte d’ensoleillement
  • perte d’intimité
  • nuisances sonores (rues étroites avec réverbérations des sons importante)
  • dépréciation de la valeur vénale

A une plus large échelle, nous pensons que ce projet est inadapté sur plusieurs points :

  • inadéquation avec le patrimoine bâti environnant
  • inadéquation avec la voirie
  • inadéquation avec les adaptations nécessaires à l’évolution du climat
  • inadéquation avec la qualité de vie, l’attractivité souhaitée pour les familles

Cette fois encore, nous reconnaissons le succès de nombreux projets menés par la ville. De très belles réhabilitations ont été menées comme rue Armorique, rue Vauban. Le tramway est une réussite et prépare sa deuxième ligne, les ateliers des Capucins attirent visiteurs, familles et touristes. Des projets sont en cours concernant l’école Vauban, le PLR.

Les équipes municipales souhaitent rendre la ville attractive, attirer des familles, et pour ce faire densifier l’habitat près des zones bien desservies par les transports en commun. Nous adhérons à cette vision qui participe à diminuer l’artificialisation des sols agricoles et l’étalement urbain.

Pour autant, nous pensons que la densification ne peut se faire qu’en étudiant l’urbanisation jusqu’au niveau des îlots. Plusieurs habitants ont déjà quitté notre quartier suite au dernier projet de 2012. Nous avons besoin de villes certes denses mais respirantes et offrant un cadre de vie végétalisé et aéré. Cela est possible, de nombreux exemples le montrent.

Nous l’évoquions dès 2011 lors du premier projet proposé sur ce terrain : la ville a besoin d’espaces de respiration, de verdure, y compris à l’échelle des îlots. Si les nombreux jardins et espaces naturels présents à Brest sont remarquables, ils n’ont pas le même effet qu’une végétation à proximité immédiate des logements.

C’était il y a 12 ans. Le changement climatique était déjà à l’œuvre et identifié – la canicule de 2003 déjà passée – et n’était pourtant pas encore dans tous les esprits.

Aujourd’hui encore, nombreux sont ceux qui pensent que Brest est à l’abri des phénomènes extrêmes. Certes, Brest est relativement « privilégiée » par rapport à d’autres, et pourtant elle doit aussi se préparer. Elle a déjà vécu des températures très élevées et doit anticiper une accélération : en 2022 :32,6°C le17 juin, 39,3°C le 18 juillet, 36°C le 16 août.

L’AVAP cite le Plan Climat 2012-2017 de Brest métropole :

« Le réchauffement constaté en Bretagne au cours du siècle passé est du même ordre que celui observé au niveau mondial. L’augmentation de température a été de 0,6°C sur le globe et de 1°C en France. Cette augmentation des températures s’accélère depuis les années 1980.

Cependant, à la lecture des connaissances actuelles, l’agglomération brestoise est privilégiée face au changement climatique. Du fait de sa position géographique, géologique et météorologique, Brest est peu exposée aux risques liés à un changement climatique de 2°C. Il est donc d’autant plus crucial de mettre en œuvre des actions visant à contenir le réchauffement climatique et contribuer ainsi à la préservation de cette situation privilégiée. »

(AVAP DE BREST – DIAGNOSTIC PATRIMONIAL, ARCHITECTURAL ET ENVIRONNEMENTAL – 185 (p. 258 du pdf))

L’accélération du changement climatique rend malheureusement ce constat obsolète. Depuis, BMO a produit le PLAN CLIMAT 2019-2025 (https://bretagne-environnement.fr/brest-metropole—plan-climat-2019-2025—programme-actions).

Nous n’y trouvons pas de mise à jour de la valeur du réchauffement moyen observé.

Sur le site statistiques.developpement-durable.gouv.fr, on trouve les informations suivantes (publiées le 21/12/2022) :

« En France métropolitaine, de 1900 à nos jours, les températures moyennes ont augmenté d’environ 1,7 °C, une valeur plus forte que celle observée en moyenne mondiale (+ 1,2 °C). Ce réchauffement a connu un rythme variable, avec une augmentation particulièrement marquée depuis la fin du XXe siècle. Depuis 1980, la tendance observée est d’environ + 0,3 °C par décennie. » (https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/les-effets-du-changement-climatique-en-france-synthese-des-connaissances-en-2022)

On le voit, le changement s’accélère. Il ne concerne pas que le réchauffement, mais également la modification des régimes de vents et de précipitations. Si Brest est connue pour son crachin, la ville aura à faire face à des sécheresses autant qu’à des épisodes pluvieux intenses, pour lesquels sont réseau n’est pas dimensionné.

Cela est très bien diagnostiqué dans le PLAN CLIMAT 2019-2025.

« INONDATIONS PAR RUISSELLEMENT :

Depuis 2010, l’augmentation de la fréquence des pluies exceptionnelles, combinées aux caractéristiques topographiques, engendrent plus fréquemment des inondations par mise en charge du système d’évacuation des eaux de ruissellement, les réseaux étant dimensionnés pour faire face aux occurrences décennales.

Ce risque a engendré à Brest 11 arrêtés catastrophe naturelle « inondations et coulées de
boue » en 35 ans et pourrait s’accroitre. »

( PLAN CLIMAT 2019-2025 p.120)

« ILOTS DE CHALEUR

Le nombre de jours de vagues de chaleur risque d’être multiplié par 5 voire 15 d’ici 2100. Aussi, la population brestoise, peu accoutumée ni équipée face aux fortes chaleurs, y sera également sensible.

Les zones les plus sensibles à cet inconfort thermique sont les zones urbanisées, à cause des phénomènes de surchauffe urbaine liés à la minéralisation des villes. »

( PLAN CLIMAT 2019-2025 p.120)

Ce plan préconise d’ailleurs des adaptations. Il identifie également très bien la nécessité de préserver la biodiversité dans la ville.

« L’enjeu de préservation de biodiversité est de taille également. Une biodiversité appauvrie diminue considérablement la capacité des écosystèmes à s’adapter aux changements climatiques. Maintenir sur un territoire les services écosystémiques apportés par la nature tels que les services de régulation (protection des sols, régulation des inondations, quantité et qualité des eaux douces, pollinisation, maintien d’une diversité d’espèces) participe fortement à la résilience du territoire et à ses capacités d’adaptation. »

( PLAN CLIMAT 2019-2025 p.122)

Le projet Lamotte nous semble aller à l’encontre des toutes ces préconisations, pourtant vitales pour conserver une ville vivable :

  • imperméabilisation des sols (reconnus pour leur rôle de stockage carbone, régulation de l’eau, entre autres)
  • augmentation du débit des eaux pluviales et usées
  • suppression d’une zone de biodiversité (oiseaux, pollinisateurs, hérissons)
  • diminution de l’albédo
  • augmentation de l’effet îlot de chaleur

Nous n’avons noté de la part du promoteur et du cabinet d’architecture aucune volonté d’architecture durable, tant dans la conception que dans la réalisation  :

  • pas de matériaux bio-sourcés
  • une rétention des eaux de pluie minimale et peu efficace
  • pas de récupération d’eau ni réutilisation
  • pas de possibilité de compost
  • pas d’implantation respectant les principes bio-climatiques

Le seul point allant dans ce sens, mis en avant plusieurs fois, est la présence d’un garage à vélos…

Afin de mieux comprendre ce que la ville de Brest préconise, nous nous sommes penchés sur le Rapport de présentation des objectifs de l’aire (AVAP – aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine) approuvé par le Conseil de la métropole le 28 juin 2019

(https://echanges.brest-metropole.fr/VIPDU72/GeoPaysdeBrest/PDF_Document_urbanisme/242900314_annexe_ecrite_3_sup_avap_20230425.pdf)

Extrait de la légende :

Le projet est donc directement entouré de :

  • constructions antérieures à 1860
  • immeubles d’inspiration classique simple
  • habitats individuels d’inspiration classique simple
  • immeubles d’inspiration classique à ornementation
  • habitats individuels d’inspiration classique à ornementation
  • habitat individuel emprunt de modernité (datant pourtant de 1896)
  • murs de clôture « particip[ant] à renforcer la cohérence de la scénographie urbaine. »
  • d’un ensemble architectural ou urbain de qualité

« Les objectifs particuliers de la ville de Brest

L’AVAP de Brest a pour but d’accompagner le projet urbain brestois, énoncé dans le PADD du PLU, dans le respect de la dimension historique de la ville et de son patrimoine, sans limiter ses possibilités d’évolution. Plus précisément, il s’agit de faire évoluer la ZPPAUP afin notamment de :

valoriser la relation à la rade et la penfeld en tirant parti de la topographie,

renforcer la présence de la nature en ville et mettre en scène un réseau d’espaces publics de qualité,

préciser les conditions de renouvellement urbain dans le centre-ville et de réfléchir aux modalités d’évolution des formes et de la silhouette urbaines,

concilier préservation du patrimoine architectural et amélioration de la performance énergétique du bâti,

s’appuyer sur le patrimoine brestois comme levier d’attractivité et de développement économique »

(p. 9 du pdf / 8 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> Dans ce projet, on détruit les sols (520m²), on dégrade l’environnement architectural d’un bâtiment – la cour à Bruslé – identifié comme immeuble remarquable dans ce même document (p.161 du pdf / 88 – AVAP DE BREST – DIAGNOSTIC PATRIMONIAL, ARCHITECTURAL ET ENVIRONNEMENTAL, p. 220 du pdf / AVAP DE BREST – DIAGNOSTIC PATRIMONIAL, ARCHITECTURAL ET ENVIRONNEMENTAL – 147, p. 306 du pdf / AVAP DE BREST – INVENTAIRE DES BÂTIMENTS REMARQUABLES – 17)

« 2.2. Objectifs urbains

[…]

protéger et valoriser les ensembles architecturaux et urbains de qualité,

préserver la composition et la forme urbaine tout en lui permettant d’évoluer. Cette thématique suppose de régler les questions liées à la densité bâtie, à la trame parcellaire, à l’implantation des constructions, au gabarit des immeubles (emprise, hauteur),

reconquérir de la ville sur elle-même dans un souci d’économie de foncier. […]

améliorer la qualité des cœurs d’îlots car ils participent à la qualité résidentielle des logements. »

(pdf. p. 35 / 34 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> Emprise : 100 %, hauteur : sans rapport avec les bâtiments riverains

=> Ici le coeur d’îlot est réduit au minimum, et se limite à un puits de lumière

« 2.3. Objectifs architecturaux

[…]

• conserver et restaurer les détails d’architecture intéressants par leur dessin ou leurs matériaux,

assurer la bonne intégration des constructions nouvelles dans le tissu existant (implantation, volumétrie, hauteur) et en lien avec les usages. »

(pdf. p. 35 / 34 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> En termes de volumétrie et de hauteur, l’architecte indique que le bâtiment s’insère harmonieusement en accord avec leur hauteur des immeubles environnants.

Nous avons pris nos crayons de couleur et relevé le nombre d’étages des immeubles riverains :

=> La majorité des constructions directement environnantes comportent un ou deux étages, excepté l’immeuble du 5 rue Laurent Legendre, point de référence du projet, et les immeubles au bas de la rue Lars, que nous figurons en hachuré car ils reposent sur un sol creusé par rapport à la rue qui est déjà en pente descendante.

On trouve quelques immeubles de 3 étages plus loin, qui sont loin d’être les plus nombreux.

On voit ici que les rues sont étroites, ce qui amplifie le sentiment d’écrasement et est déjà un défi quotidien à la circulation des voitures et des piétons et au stationnement.

On peut aussi observer que la voirie n’est pas adaptée pour le passage des gros engins de chantiers, et que les constructions, pour la plupart anciennes, riquent de souffrir des impacts des travaux (vibrations lors de la réalisation des fondations…), comme cela s’est vu dans d’autre quartiers.

« 2.4. Objectifs paysagers

  • maintenir la lecture du site urbain et du grand paysage par la préservation des vues remarquables, afin notamment de valoriser la relation ville/rade :
  • préservation des vues panoramiques lointaines plus ou moins ouvertes sur le grand paysage : panoramas depuis/vers la rade et les entrées maritimes, panoramas depuis le tour de ville et panoramas de part et d’autre de la Penfeld (co-visibilités entre rive gauche et drive droite),
  • préservation des perspectives sur les points émergeants et la mise en scène des monuments, préservation des vues cadrées correspondant aux échappées visuelles depuis l’intérieur du tissu urbain vers le grand paysage ou un point focal,
  • préservation des perceptions sur la superposition ville/socle,
  • renforcer la présence de la nature en ville, en lien avec l’armature verte urbaine, pour garantir aux habitants un cadre de vie de qualité. »

(pdf. p. 35 / 34 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> Suppression de la vue dégagée vers la rive gauche pour de nombreux logements des rues Fréminville et Laurent Legendre

=> Suppression d’un espace végétalisé de 520m² (670m² de nature potentielle si on imagine une autre destination pour la parcelle des garages)

« 2.5. Objectifs environnementaux

préserver les éléments boisés remarquables et les espaces à dominante végétale d’intérêt patrimonial,

assurer la mise en réseau et la gestion responsable de l’armature verte urbaine, et plus largement des espaces végétalisés,

maîtriser la gestion des eaux pluviales,

maîtriser les consommations énergétiques et permettre le développement des énergies renouvelables dans le respect des qualités architecturales et paysagères. Cette thématique est également liée aux objectifs architecturaux et de développement durable. »

(pdf. p. 36 / 35 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> forte augmentation de l’imperméabilisation des sols (+ augmentation eaux usées), déjà problématique dans le précédent projet

=> suppression de l’ensoleillement des riverains impactant qualité de vie et consommation énergétique.

« 2.6. Objectifs de développement durable

La transmission de notre héritage aux générations futures est le principe fondateur du développement durable. En ce sens, le patrimoine, qu’il soit architectural, paysager, historique ou culturel, doit être préservé et mis en valeur en tant qu’élément essentiel de notre identité collective.[…]

Dans ce contexte, […], les objectifs de développement durable au sein de l’AVAP se traduisent par :

la préservation du paysage et de l’armature verte urbaine,

l’équilibre entre le renouvellement urbain, l’utilisation économe des espaces et la préservation des formes urbaines,

la sauvegarde et la mise en valeur des ensembles urbains et du patrimoine bâti remarquable,

[…] »

(pdf. p. 36 / 35 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> patrimoine architectural dégradé, y compris bâtiments remarquables

=> artificialisation totale d’une parcelle naturelle

« Le règlement précise à tout porteur de projet les règles de mise en valeur des propriétés bâties ayant un intérêt patrimonial, dans le respect des principes fondamentaux suivants :

tenir compte de l’histoire et de l’architecture du lieu d’intervention,

entretenir, restaurer ou faire évoluer le patrimoine avec un souci d’authenticité historique,

intégrer des règles de «bon voisinage» entre les constructions, garantes d’une insertion urbaine harmonieuse,

permettre l’émergence d’une architecture contemporaine de qualité, respectueuse des spécificités locales et en harmonie avec l’environnement existant. »

(Pdf p.51 / 50 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> « insertion » inexistante. Immeuble massif, imposant. Construction de bacs de tri sur la voie publique, rendant la rue encore plus étroite.

=> architecture banale, ne répondant en rien à l’architecture existante

=> implantation au droit du trottoir, ne respectant pas l’implantation actuelle du mur de pierre

« Enjeux de protection et de valorisation

Il s’agit de conserver le caractère de creux urbain, d’espace de respiration dans la logique de la composition urbaine à l’échelle du centre-ville ou du quartier. Leur mise en valeur doit être sous tendue par des aménagements respectueux de leurs caractéristiques patrimoniale et identitaire. De plus, les aménagements, qu’ils soient à dominante minérale ou végétale, doivent prendre en compte les préoccupations liées au développement durable en faveur de l’environnement et de la biodiversité.

[…]

Des dispositions règlementaires complémentaires visent à promouvoir une gestion responsable des espaces dans le respect des préoccupations de développement durable : favoriser l’emploi de matériaux durables et perméables afin de permettre l’infiltration des eaux pluviales[…]»

(pdf p.54 / AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION – 53)

=> imperméabilisation, bétonisation d’une zone végétalisée permettant

  • régulation de la température
  • régulation de la qualité de l’eau
  • régulation du débit des eaux pluviales, régulation du risque d’inondation
  • biodiversité (oiseaux, insectes, hérissons)
  • une atténuation du bruit, dans ces rues étroites où les sons résonnent fortement
  • qualité de l’air
  • stockage du carbone
  • bien-être des habitants

« Couplée à la candidature de Brest au label « Ville d’Art et d’Histoire », l’AVAP peut participer à renouveler l’image de la ville non seulement pour la population locale mais aussi dans l’objectif de favoriser le développement touristique, notamment pour ce qui concerne le tourisme de courts séjours urbains. »

(pdf p.67 / 66 – AVAP DE BREST – RAPPORT DE PRESENTATION)

=> Effectivement, les communications faites par la ville amènent vers nos rues de nombreux touristes, que nous avons plaisir à renseigner. Ils sont nombreux à s’arrêter admirer la cour à Bruslé ainsi que la jolie petite maison en retrait rue Fréminville, aux encadrements en pierre du Roz, de 1896 réhaussée en 1911 (figurant dans le document graphique de l’AVAP comme habitat individuel emprunt de modernité).

Le dépliant « Balade de Recouvrance » auquel nous faisions référence en 2012 a contribué à la promotion de ce patrimoine, en invitant les promeneurs à passer par la rue Lars, et en pointant le caractère remarquable de la cour à Bruslé.

Nous sommes d’ailleurs déçus de constater que la cour à Bruslé a disparu des nouvelles balades..

https://brest.fr/sites/default/files/media/document/brest_metropole_vah_parcours4_recouvrance.pdf

« Le secteur de Pontaniou, épargné par les bombardements mais non par les opérations de restructuration immobilière, présente une structure urbaine pittoresque (rue de Saint-Malo et terrasses avoisinantes) et des monuments comme l’ex-prison de Pontaniou, l’immeuble-pont dit « bâtiment aux Lions » et la « cour à Bruslé » du 18ème siècle. Pris indépendamment, certains immeubles peuvent être qualifiés de remarquables, comme la maison de la Fontaine ou l’église Saint-Sauveur… Cependant, le quartier présente des ensembles urbains méritant d’être protégés au titre d’ensemble architectural et urbain de qualité. »

(Pdf p.161 / 88 – AVAP DE BREST – DIAGNOSTIC PATRIMONIAL, ARCHITECTURAL ET ENVIRONNEMENTAL)

« 5.2.1. Les édifices antérieurs à 1860

Cette typologie concerne les constructions les plus anciennes de Brest (édifiées avant 1860). Elle correspond pour l’essentiel à l’urbanisation du quartier Recouvrance au 18ème siècle, particulièrement dans le quartier Saint-Sauveur et aux abords du quai Jean Bart. Si les formes architecturales peuvent être variées, la composition est symétrique avec une accentuation centrale autour d’une porte monumentale. Des détails d’architecture comme des pilastres en kersantite, et plus généralement un souci d’apparat, singularise cette architecture classique, comme la maison de la Fontaine ou la cour à Bruslé. En raison de leur rareté et de leur intérêt historique, les quelques bâtiments qui appartiennent à cette catégorie sont protégés en tant qu’immeubles remarquables. »

(pdf p.220 / AVAP DE BREST – DIAGNOSTIC PATRIMONIAL, ARCHITECTURAL ET ENVIRONNEMENTAL – 147)

=> le projet est immédiatement à proximité d’un édifice antérieur à 1860 repéré par l’AVAP comme immeuble remarquable à protéger, et d’édifices d’inspiration classique simple.

Ce projet ne protège pas ce patrimoine, mais le dégrade en niant son existence et en ne recherchant à aucun moment à être en harmonie avec lui.

Par harmonie, nous n’entendons pas que le projet devrait « mimer »  l’architecture existante. Un projet d’architecture contemporaine ambitieux architecturalement pourrait parvenir à une mise en valeur réussie. Le projet qui est soumis aujourd’hui est comme conçu « hors sol », il pourrait être implanté dans n’importe quel quartier de n’importe quelle ville (on en voit d’ailleurs de similaires un peu partout)

« 2.7.2. Présence végétale

Tout projet de réhabilitation globale, à l’échelle d’un immeuble ou d’un cœur d’îlot, ou de construction neuve doit concourir à la végétalisation du cœur de l’îlot (arbres – buissons – végétation grimpante sur la façade arrière ou sur les murs de clôture…).

Les parties non bâties et non circulées doivent faire l’objet d’un aménagement paysager de qualité, constitué de différentes strates végétales (engazonnement ou couvre sol, arbustes bas et moyens, arbres de petit et moyen développement en ponctuation) visant

à préserver ou conforter le caractère verdoyant du site et la diversité des habitats pour la petite faune urbaine.

[…]. »

(pdf p.603 / AVAP DE BREST – REGLEMENT – 13)

=> Ici le constat est simple, le projet, qui détruit une parcelle de nature, ne propose AUCUNE végétalisation.

« 3.2.2. Volumétrie

Afin d’assurer une bonne insertion du projet dans son contexte urbain et paysager, la volumétrie et l’épaisseur des constructions nouvelles doivent s’harmoniser avec celles des bâtiments existants, tenir compte de la situation urbaine et paysagère du projet, et se raccorder de façon harmonieuse aux bâtiments voisins. »

(pdf p.612 / 22 – AVAP DE BREST – REGLEMENT)

=> Nous avons pris la liberté d’utiliser les données publiques Litto3D et les données communiquées par l’architecte du projet pour réaliser des représentations 3D de notre quartier, avant/après. Cela permet de se rendre compte de l’inadéquation, à notre avis, du volume du projet par rapport à son environnement.

vue aérienne
Vue de la rue Fréminville
Vue de la rue Fréminville
Vue de la rue Lars

En conclusion, vous le savez, nous n’avons jamais été contre un projet immobilier sur cette parcelle. Nous avons lutté contre des projets démesurés et appauvrissants pour notre quartier, et restons déterminés sur cette ligne.

Nous pensons qu’un projet à la mesure du quartier, ambitieux architecturalement, respectueux des hauteurs et volumes des bâtiments environnants, préservant de l’espace naturel dont tout le monde puisse bénéficier est possible.

Bien sûr, notre rêve à tous serait que la ville rachète ce terrain afin qu’il devienne l’un des poumons verts de la ville, permettant à la fois une mise en valeur du patrimoine environnant, une préservation des sols et de la biodiversité, une régulation de la température et une meilleure gestion de l’eau, une amélioration de la qualité de vie.

Depuis quelques années, la nature a totalement envahi cet endroit. Les murs sont aujourd’hui couverts de lierre hébergeant nombre d’oiseaux. Les hautes herbes protègent des hérissons que nous avons la chance d’observer le soir. Les fleurs attirent d’innombrables insectes butineurs et papillons. Nous avons plaisir à ouvrir nos fenêtre sur cette nature foisonnante nous offrant les chants d’oiseaux au petit matin. Pour les nombreux habitants du quartier ne disposant pas de jardin, il est un peu le jardin de tous.

Nous aimerions bien sûr l’embellir et l’entretenir comme il le mériterait.

Cela paraît utopique, et pourtant…

De nombreuses sources montrent les bénéfices de la nature au cœur de la ville

  • régulation de la température
  • régulation de la qualité de l’eau
  • régulation du débit des eaux pluviales, régulation du risque d’inondation
  • biodiversité (oiseaux, insectes, hérissons)
  • une atténuation du bruit, dans ces rues étroites où les sons résonnent fortement
  • qualité de l’air
  • stockage du carbone
  • bien-être des habitants

Dans toutes nos réunions, les mots « jardin », « jardins partagés » arrivent dès les premières minutes. Aujourd’hui s’ajoutent de nouvelles idées comme des garages à vélos, donc rêvent les habitants d’immeubles ne disposant pas de système de garage.

Nous rêvons, et pourtant cela est loin d’être inaccessible. La ville de Brest protège et développe déjà la nature dans la ville. Cette idée nous paraît en totale cohérence avec les préconisations actuelles de la ville, et de nombreux acteurs.

Le Cerema par exemple, explique le rôle de la nature en ville dans de nombreux documents, par exemple « L’arbre, l’essence de la ville »: (https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/arbre-essence-ville-0)

L’ANRU (Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine) parle de ville résiliente :

https://www.calameo.com/anru/read/00642592165196c242f2a?authid=j5GM9nyE09em

L’ADEUS (Agence d’Urbanisme de Strasbourg) parle des îlots de chaleur dans les villes https://www.adeus.org/publications/les-ilots-de-fraicheur-dans-la-ville/

Le « Manifeste pour le Zéro artificialisation nette » du Club Ville Aménagement, auquel a participé Bma, décrit bien les injonctions contradictoires de la « Zero Artificialisation Nette » (ZAN) :

https://www.brest-bma.fr/wp-content/uploads/2020/11/cva20200619_manifeste_zan_final.pdf

Pour toutes ces raisons, cette fois encore, nous vous demandons de ne pas accepter ce projet, qui va à l’encontre de toutes les bonnes pratiques, tant d’un point de vue patrimonial qu’urbanistique et environnemental.

Peut-être cela est-il difficile à évaluer sur le papier. Peut-être notre discours dans ce courrier n’est-il pas suffisant.

Nous sommes un collectif soudé et convaincu, mais toujours prêt au dialogue et respectueux de toutes les parties. Nous vous invitons donc à venir nous rencontrer afin de mieux vous rendre compte. Nous sommes plusieurs riverains volontaires qui serons ravis de vous recevoir pour vous offrir thé ou café et vous permettre de vous rendre compte sur place, depuis nos salons, des bénéfices de cet espace libre et des préjudices que nous subirions, nous riverains mais aussi le quartier et par delà la ville de Brest.

Espérant cette fois encore votre compréhension, votre adhésion et votre soutien actif, nous vous prions, Monsieur le Maire-Président, Madame l’adjointe au Maire, Madame la vice-présidente, de croire en notre esprit constructif.

Pour P.E.C.A.B,
La présidente

Sophie Brégent